mardi 28 février 2017

Le Grand Orient - L'affaire des fiches


Émile, Justin, Louis Combes, né à Roquecourbe (Tarn) le 6 septembre 1835, et mort à Pons (Charente-Maritime) le 25 mai 1921, est un homme politique français
Il en est élu maire en 1876, et tiendra ce poste jusqu'en 1919 puis sénateur de la Charente-Inférieure en 1885 et devient Président de "La Gauche Démocratique".
Il entre au ministère de l'Instruction publique en 1895. En 1902, il est désigné président du Conseil et mène alors une politique dite du « Combisme » fortement anticléricale, qui mènera en 1905 à la loi de séparation des Églises et de l'État et à l'aboutissement de l'école laïque en France
         
Dès le 20 juin 1902, Emile Combes envoie une circulaire aux préfets pour mettre en place la discrimination administrative pour délit d'opinion.

Les purges et les discriminations combiennes affectent l'administration et l'éducation ; elles affectent aussi l'armée. Officiellement depuis mai 1904, mais sans doute depuis plus longtemps, le général Louis André, de l'état-major du ministre de la guerre, faisait établir des fiches sur les opinions et la vie privée des officiers. Les délateurs portaient en marge : " va à la messe " ; " va à la messe avec un livre ", ou bien " a assisté à la communion de son fils ". Parfois cela se résumait à des abréviations : " VLM " pour " Va à la messe " ; " VLMAL " pour " Va à la messe avec un livre ". De ces fiches dépendaient mutations ou avancements. Vingt cinq mille fiches sont ainsi établies par les Francs-Maçons du Grand Orient de France, pour le compte du Ministère. (Dès 1878, vingt-cinq ans plus tôt, huit ans après la proclamation de la Troisième république, Gambetta avait commandé une enquête au Grand-Orient sur les opinions politiques de l'état-major. Celui-ci avait mis à sa disposition les moyens d'investigation de 400 loges). Le gouvernement de la IIIe République est qualifié de «république des francs-maçons» (on évalue à 30.000 le nombre de francs-maçons dans les instances politiques parmi lesquels 250 députés, 200 sénateurs et un grand nombre d'instituteurs).

Toutefois, le secret s'évente. Un employé des loges, J. Bidegain, les communique au Figaro, qui les publie le 27 octobre 1904. Le général André est giflé en public par un député, Gabriel Syveton. Trente-cinq députés francs-maçons se désolidarisent du ministère Combes. Selon eux, les loges avaient violé les statuts de l'Ordre en travaillant pour un service public. Pour se justifier, le conseil de l'Ordre du Grand-Orient invoqua la nécessité d'épurer l'armée.

Le terme "républicain" signifie, d'après le contenu des fiches, "anticlérical". Dans un discours de 1904, Emile Combes considère qu'il y a "incompatibilité radicale de principes" entre l'église et la république. D'où l'équation simple : chrétien = ennemi de la république.

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Gabriel Syveton, qui avait giflé le général André en public, sera calomnié et lynché médiatiquement. Il sera retrouvé mort par asphyxie chez lui quelques semaines plus tard, le 8 janvier 1905, dans des circonstances assez mystérieuses (et semblables, curieusement, à la mort de Zola en 1902). La police bouclera le dossier en concluant au suicide.

Les officiers considérés comme « réactionnaires et cléricaux », généralement issus de familles catholiques, ont été souvent écartés des postes importants de l'armée, quelquefois au profit de carriéristes médiocres issus des loges ou de la clientèle des partis de gauche, et la France a dû se passer d'eux pendant la Première Guerre mondiale, en tant qu'officiers d'active à tout le moins.

La campagne des fiches a pour effet de bloquer l'avancement de certains officiers, compétents mais jugés trop proches de l'Église, comme Ferdinand Foch dont le frère est jésuite ! Elle favorise par ailleurs la promotion d'officiers républicains athées et laïcs mais incompétents, tel Joseph Joffre, ce qui aura des conséquences désastreuses sur les premiers engagements de la Grande Guerre, dix ans plus tard.
Beaucoup d'officiers indûment promus (dont près de la moitié des 425 généraux !) seront alors «limogés» en catastrophe, autrement dit affectés à des bases éloignées du front comme Limoges (d'où l'origine du verbe «limoger», inventé pour l'occasion).

"La vérité vous délivrera"
Jésus Christ